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Un chef d’expédition au bureau comme dans la neige : les leçons de Jean-Philippe Guérin

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Parrain de la nouvelle promotion de stagiaires experts-comptables, ayant prêté serment ce 6 septembre 2023 à l’occasion des UE, il partage son expérience de la gestion d’une équipe.

Si nous devions présenter Jean-Philippe Guérin en une phrase nous pourrions simplement dire que c’est un homme d’expérience. Après 27 années dans la gendar- merie, il découvre en tant qu’officier, ce qu’on appelait le commandement des hommes, aujourd’hui le métier de manager. Il dirige des unités opérationnelles, en tant que pilote d’hélicoptère puis devient directeur d’enquêtes criminelles, patron de 1 400 gendarmes, conseiller pour des cabinets ministériels, ou encore directeur au sein du groupe français Fiducial.

Au-delà de son parcours professionnel hors du commun, ce sont avant tout les expériences humaines qui ont rythmé sa vie, d’abord à l’occasion d’un tour du monde réalisé pendant 18 mois mais aussi en 2021, lors d’un séjour dans une base polaire scientifique en Antarctique.

Son moteur : accompagner chacun dans ce qu’il a de meilleur à offrir

De ses nombreuses expériences, et de son parcours singulier, une chose subsiste : la clé de voûte de toute organisation, c’est un salarié bien dans sa peau et dans ses baskets, il nous confie : « placé au bon endroit, il sera tout de suite capable d’accomplir des choses extraordinaires ».

« Si vous mettez un spécialiste du piano devant un violon, il ne sera pas bon, si vous le mettez devant un piano, il sera très bon. Et le travail du patron, c’est aussi d’identifier cela. Chaque humain apporte, par ses compétences personnelles, sa pierre à l’édifice. »

Selon lui, lorsqu’on est au plus près de ses personnels, qu’on les écoute, qu’on les comprend et les entend, on s’aperçoit qu’on arrive à créer de la cohésion et à les emmener où on veut.

De ces années aux côtés de compétences si variées, il retire une philosophie de vie qui le pousse constamment à l’optimisme, à la relativité et à la sérénité. Il croit en l’humain, « la seule véritable richesse de toute organisation quelle qu’en soit la finalité ».

L’Antarctique : ou comment aider chacun à repousser ses limites

« Un challenge extraordinaire », c’est ainsi que Jean-Philippe Guérin présente son expérience en Antarctique réalisée en 2021. Une opportunité riche qui lui a permis de vivre, avec son équipe de personnels scientifiques et techniques, 14 mois de mission, dont 9 en isolement complet.

Ces quelques mois aux côtés d’une équipe hétéroclite étaient un grand défi managérial : accorder des tempéraments et des motivations diverses vers un même objectif. Il nous explique : « on mange ensemble, on travaille ensemble, on crée de réels liens de solidarité durables, comme une grande famille. Dans ce contexte, au moindre problème, personne ne peut quitter le navire. Il faut que chacun soit accompagné quand il a une baisse de moral. »

Au cours d’une telle expérience, « vous avez besoin de chacun parce qu’il n’y a pas de doublure, c’est à dire que vous avez une seule personne pour chaque secteur. Cela signifie que si quelqu’un, pour une raison physique ou psychologique, tombe, on n’a personne pour le remplacer. Il faut de toute façon éviter que cela n’arrive, et si jamais c’était le cas, il faut qu’on puisse la remettre en selle. Ça, humainement, c’est juste géant. »

La mission de Jean-Philippe Guérin aura été essentielle : mettre en musique les compétences de personnes issues de domaines très divers.

« Vous avez quand même un job à faire à la base, et il doit être fait, nous ne sommes pas en vacances là-bas, il y a des programmes scientifiques à faire tourner, une base à entretenir donc il faut que les gens fassent leur travail, ils sont là pour ça. Penser au bien-être de chacun est un enjeu central. » Pour lui, il faut adopter plusieurs formes de management et savoir utiliser la bonne au juste moment. Ne pas être trop dur, ni trop souple, savoir adopter le juste milieu, « En fonction du temps et du moment où ça se présente, on peut utiliser soit l’un, soit l’autre. » nous confie-t-il en prenant l’exemple de la « carotte et du bâton ».

L’humain au cœur de la machine

« Ce que je retiens, c’est que finalement l’humain, c’est la clé de tout et ce, quel que soit l’endroit où on est. » De nature optimiste, Jean-Philippe Guérin préfère voir les atouts extraordinaires de chacun.

« Un manager, patron, expert-comptable, sera probablement amené à diriger des équipes, et s’il prend conscience de la valeur de ses collaborateurs, de la richesse humaine, et qu’il sait les faire grandir et les accompagne, les personnes le lui rendront au centuple. » À l’inverse, nous dit-il, « s’il les traite mal, s’il a une mauvaise approche de l’humain, des comportements durs, il ne faut pas qu’il se fasse d’illusions, les gens lui renverront l’ascenseur sans aucune difficulté, de manière très négative. Si ça fonctionne dès le départ au niveau humain, tout le reste fonctionnera. »

Selon lui, il faut que le manager comprenne que la première vraie richesse, ce sont les équipes et les collaborateurs. Il faut avoir le courage de dire quand « ça va » mais aussi quand ça ne va pas. Faire face aux problèmes et tenter de les régler demande du courage : « La dictature du chiffre et du profit, ne doit pas nier l’humain derrière. Vous pourrez faire autant de profit que vous voulez, si les équipes ne sont pas au niveau, cela ne servira à rien. Vous les perdrez, et votre turnover sera immense ».

Prendre « le bon train »

Quand on demande à Jean-Philippe Guérin s’il a un conseil à nous transmettre afin de garder un esprit optimiste, c’est également avec le sourire qu’il nous confie simplement : « Je me compare souvent à quelqu’un qui est sur un quai de gare et qui voit des trains passer. Soit, vous attendez de savoir où va le train et vous n’avez pas le temps de monter dedans, soit vous décidez de monter dedans, puis vous verrez bien. Globalement, on n’est pas déçu et toutes les expériences sont bonnes à prendre : on ne sait pas toujours où le train va aller mais ce n’est pas très grave, le plus important, c’est le train, ce n’est pas tellement la destination. C’est dans ces moments que l’on fait des rencontres, et c’est génial. »

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