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En mai dernier, la Croix-Rouge française a lancé un accélérateur de startups, le 21. Antoine Verstraete, le responsable de la communauté, revient sur les raisons de cette création et nous décrit l’accompagnement apporté aux différents projets.
Antoine Verstraete
responsable de la communauté
Le 21, notre accélérateur d’innovation sociale, a été lancé le 21 mai dernier. L’association a constaté que les besoins sociaux augmentent et se diversifient : il y a de plus en plus de personnes passant sous le seuil de pauvreté, de nouveaux enjeux apparaissent, comme la fracture numérique, qui créent des situations inédites de précarité. Par ailleurs, nous sommes confrontés au désengagement des pouvoirs publics. Nous avons dû répondre à ce défi – faire plus avec moins – et trouver de nouvelles solutions. La direction de l’innovation sociale de la Croix-Rouge française a souhaité offrir un terrain d’expérimentation unique à tous ceux qui veulent changer la façon dont les choses se passent.
Avec 18 000 salariés et 50 000 bénévoles en France, la Croix-Rouge est une très grande organisation sociale. Nous avons choisi de privilégier les solutions qui viennent du terrain, mais aussi les structures extérieures à la Croix-Rouge : les startups, les entrepreneurs sociaux, etc. Pendant 6 mois, nous allons accompagner les intrapreneurs, bénévoles ou salariés de la Croix-Rouge, qui présentent un projet répondant à nos enjeux, mais également 4 entrepreneurs (association, startup…) que nous avons identifiés en fonction du service ou du pro-duit qu’ils ont imaginé. Il fallait que le projet soit pertinent par rapport à notre action, et utilisable sur nos territoires. L’accélérateur constitue un accès direct à l’écosystème de l’innovation sociale, il permet d’inventer le progrès social du XXIe siècle.
En janvier 2019, nous avons commencé à identifier les besoins. Nous avons procédé à un appel à projets public, relayé sur nos réseaux, et reçu 150 dossiers de candidature (dont 50 en interne).
Il a fallu sélectionner 20 projets qui sont passés devant un jury composé d’experts métiers de la Croix-Rouge française, des personnes externes travaillant sur des sujets proches des nôtres, comme par exemple des membres de l’association Le Carillon, un acteur du monde associatif proche de notre ADN. Le jury a retenu 4 entrepreneurs et 4 intrapreneurs.
Intrapreneurs comme entrepreneurs bénéficient d’un accompagnement métier, grâce au réseau de salariés et de bénévoles de la Croix-Rouge française, et via un ensemble de référents de 21, experts en accompagnement de projets sociaux (stratégie, modèle économique, prototypage).
Nous leur proposons aussi d’expérimenter sur le terrain les solutions proposées, auprès de nos publics. Les nombreuses structures de la Croix-Rouge française offrent un terrain d’expérimentation unique pour ceux qui veulent tester et développer leurs idées.
Ceux-ci ont accès aux conseils de professionnels externes (juridique, finance), à un corpus de formations (co-création, design, stratégie), à des logiciels et à des outils de gestion adaptés et à un poste de travail au sein de notre espace de coworking. Cet accompagnement est complété par un financement pour mener l’expérimentation de 15 000 €. L’accompagnement de chaque projet dure 6 mois.
Enfin, nous avons plusieurs partenaires comme Malakoff Médéric Humanis, Makesense (expert de l’intrapreneuriat), Simplon (formation au code informatique), VR Connection (un studio de réalité virtuelle). Nous faisons aussi du mécénat de compétence avec des cabinets d’avocats ou des développeurs web pour compléter le dispositif mis à disposition des participants au programme.
Nathalie Attias est avocat à la Cour, membre du Conseil de l’Ordre, coordinatrice de l’incubateur du barreau de Paris, et Présidente ACE Paris. Elle nous explique les raisons qui ont présidé à la création de l’incubateur et son fonctionnement.
Nathalie Attias
avocate à la Cour, membre du Conseil de l’Ordre, coordinatrice de l’incubateur du barreau de Paris et présidente ACE Paris
En 2014, le bâtonnier de Paris Pierre-Olivier Sur a souhaité créer un incubateur, à l’époque une sorte de think tank, pour réfléchir aux questions liées à l’innovation juridique. C’était un incubateur d’idées plus qu’un incubateur de startups, pour initier ou former les avocats à la transformation numérique de leur métier. En janvier 2018, Marie-Aimée Peyron, bâtonnier nouvellement élu, a choisi de favoriser la création de startups : nous avons inauguré les locaux en juillet 2018, au sein de l’école de formation du barreau (EFB). Le Lab EFB a créé un cursus d’apprentissage numérique destiné aux avocats en formation. Il nous paraissait logique que l’incubateur soit à proximité de ce Lab.
Le premier appel à projets a été lancé dans la foulée de l’inauguration. Pour cette première promotion, les critères étaient volontairement très larges. L’objectif était d’encourager les avocats à se lancer dans l’outil numérique pour vendre leur prestation autrement, de manière innovante. Nous avons reçu 35 candidatures, parmi lesquelles 4 projets ont été choisis. Les entrepreneurs ont été accompagnés pendant 12 mois par l’agence Hercule, une agence spécialisée. Ateliers individuels et collectifs (conception, développement commercial et technique, management, méthode de travail pour conduire l’innovation, financement…), conférences de personnalités à succès issues du droit ou d’autres secteurs… Le programme, très complet, a constitué une belle rampe de lancement. Pour notre 2e appel à projets (dont les résultats seront publiés en septembre), les critères ont été resserrés, avec deux critères obligatoires : la société qui porte le projet doit être détenue à 51 % par un avocat, et le projet doit apporter une valeur ajoutée pour les avocats.
Notre credo est qu’il ne faut pas avoir peur de l’outil numérique : c’est une opportunité, qu’il faut savoir saisir. Le marché du droit est envahi par les braconniers du droit qui ne présentent pas nos garanties déontologiques. C’est aujourd’hui qu’il faut innover, demain il sera trop tard ! Avocats et juges ont peur du risque d’ubérisation de la profession. Ce risque existe, mais c’est en utilisant l’outil numérique dans notre exercice quotidien que nous pourrons l’éviter.
Au-delà de l’évolution technologique, les avocats doivent repenser leur façon d’exercer. Et l’interprofessionnalité constitue une piste de réflexion intéressante. Nous sommes attentifs à ce que font les autres professions réglementées, et nous souhaitons la création de ponts avec elles. Un événement interprofessionnel qui traite de l’innovation est prévu avant la fin de l’année. Je crois que toutes les professions réglementées devraient se doter d’un incubateur : aujourd’hui, personne ne peut ignorer les avancées technologiques.
PARTICIPER
DECOUVRIR
SE TRANSFORMER
PROGRESSER
S’INSPIRER