Par Charlotte Zweibaum, présidente du comité RSE de l’Ordre Paris Ile-de-France, Valérie Toffa, expert-comptable et commissaire aux comptes, et Frédéric Alexis.
Depuis juillet 2010, l’article 25 de la loi Grenelle impose à environ 3 000 entreprises françaises la publication et le contrôle d’un rapport RSE. 3 000 entreprises, c’est mieux que rien, mais c’est peu… C’est pourquoi en juin 2016, en Pays de Loire, 25 acteurs publics et privés ont décidé d’aller plus loin en s’accordant sur une base commune d’évaluation des entreprises avec 35 critères, permettant de délivrer une « attestation RSE » à plus de 270 000 sociétés françaises.
Une expérience stimulante.
LA RSE, INDICATEUR DE PERFORMANCE… ET LEVIER DE CROISSANCE
Lors des dernières Universités d’été, à l’occasion de l’atelier animé par le comité RSE, tous les experts réunis étaient unanimes sur l’intérêt de prendre en compte les critères RSE pour mesurer et optimiser la performance des entreprises. Alain Gerbier, directeur des entreprises de la Banque de France, et Roger Martineau, directeur Pays de Loire, ont ainsi rappelé que la Banque de France a intégré depuis 2014 l’impact d’une démarche RSE dans l’analyse qualitative de sa cotation crédit. Pour mémoire, la cotation Banque de France FIBEN concerne 270 000 entreprises en France (celles dont le CA est supérieur à 750 000€) et génère 50 000 entretiens avec les dirigeants¹.
« En termes de risque de crédit, l’impact est important », a précisé Olivier de Marignan, directeur général de la Banque Populaire Atlantique (BPA) et ancien président de la Fédération bancaire française (FBF) Pays de Loire : « la cotation Banque de France influe directement sur la capacité et les conditions d’emprunt des sociétés notées. ».
Désormais, les entreprises investies dans une démarche RSE sont perçues par le monde financier comme étant plus vertueuses et plus solvables que leurs consoeurs, en deux mots moins risquées.
Le secteur de l’assurance n’est pas en reste puisque, selon François Garreau, responsable RSE de Generali France, les corrélations statistiques montrent une forte diminution de la sinistralité en relation avec la politique RSE définie et mise en oeuvre par l’entreprise. L’économie peut atteindre jusqu’à 30 % de la prime. Actuaire et professeur en gestion des risques à Audencia Business School, Frédéric Alexis a précisé que plusieurs études menées, notamment en Pays de Loire dans le cadre du collectif « Trajectoire RSE, Banques et Entreprises », ont non seulement montré un lien de corrélation entre le niveau de risque de défaillance et le degré d’implication en matière de RSE, mais aussi un surplus de performance pouvant atteindre 13 %. La RSE n’est donc pas seulement un outil de gestion des risques, mais aussi un levier de croissance !
La #RSE n’est pas seulement un outil de gestion des risques, mais aussi un levier de croissance ! Cliquez pour tweeterL’intérêt est tel qu’un accord spécifique regroupant toutes les banques de la place, Bpifrance, la région Pays de Loire et le Fondes, a vu le jour, permettant de financer un audit RSE pour les PME à hauteur de 20 000€ puis le plan d’actions associé à des actifs matériels et immatériels².
Thierry Faba, expert-conseil en gestion des risques et président de Planet’RSE Toulouse, a souligné que les demandes des entreprises s’étendent à tout le territoire.
Pour sa part, il mène actuellement une étude de ROI sur les différences actions RSE avec le Centre des Jeunes Dirigeants et une vingtaine d’entreprises. Et la rentabilité est au rendez-vous !
Arnaud Bailly, PDG de Vupar et dirigeant responsable de l’Ouest, estime, pour sa part, qu’au-delà de l’aspect réglementaire, le besoin de communiquer sur la politique RSE de l’entreprise vis-à-vis de ses parties prenantes est de plus en plus prégnant. Ne serait-ce que pour participer aux appels d’offres de Nantes Métropole, qui a intégré les critères RSE des participants au même titre que les aspects financiers.
Enfin, Valérie Toffa, expert-comptable et commissaire aux comptes, considère que du fait de l’intégration des parties prenantes dans l’analyse RSE, les fournisseurs des entreprises soumises à l’article 225 ou répondant aux exigences du devoir de vigilance sont de plus en plus sollicités sur leur propre stratégie RSE.
1 https://entreprises.banque-france.fr/sites/default/files/media/2016/11/30/banque-de-france-guide-reference-cotation.pdf
2 https://www.youtube.com/watch?v=rRc48Dc3V0w
UNE NOUVELLE MISSION POUR L’EXPERT-COMPTABLE
Le législateur, au travers de l’article 225 de la loi Grenelle 2, se préoccupe de la politique RSE des entreprises d’une certaine taille et les oblige à fournir un rapport contrôlé par un organisme tiers indépendant. En tant qu’interlocuteur privilégié et tiers de confiance du chef d’entreprise, l’expert-comptable est en mesure de fournir aux entreprises une information normée, lisible et interprétable par tous, que ce soit pour les entreprises concernées par cette loi… ou pour les autres.
Permettre à chaque PME et TPE qui le souhaite de communiquer de manière efficace et fiable sur sa politique RSE, c’est justement l’objectif de « l’attestation RSE » mise au point à titre expérimental par un groupement d’acteurs publics et privés en Loire-Atlantique (Nantes Métropole, Banque de France, FBF, BPA, Dirigeants Responsables de l’Ouest, Planète RSE, ORDEC, etc.) comme base commune d’évaluation des entreprises. Etabli par l’expert-comptable, ce document prend modèle sur l’attestation de présence de l’article 225. Il nécessite la revue de 35 critères RSE répartis en critères économiques, environnementaux, sociaux, sociétaux et de gouvernance.
L’absence de certains de ces critères devra être justifiée auprès de l’expert-comptable, dont le jugement s’appuiera également sur l’impact potentiel de cette absence sur les parties prenantes. La mise en oeuvre de la revue de ces 35 critères doit toutefois rester simple.
L’attestation ne nécessite aucun jugement de la part du professionnel et s’appuie sur la norme des procédures convenues NP 4400.
Nous avons aujourd’hui l’opportunité de mettre en oeuvre cette nouvelle offre de services, mais attention, les experts-comptables n’en ont aucunement l’exclusivité. Sachons donc nous en saisir et développer cette mission innovante, prélude à toutes celles qui s’y ajouteront en matière de conseil, et pour lesquelles les banques et les régions peuvent d’ores et déjà octroyer un financement.