Comme toujours, la rentrée scolaire sonne le temps des bonnes résolutions. Que vous ayez passé l’été sur une plage coupée du monde ou que vous n’ayez eu pour seule réponse à vos mails des deux derniers mois qu’un « en congés jusqu’au 31 août… », la période estivale est bien souvent l’occasion d’une digitale detox imposée. Pour rester sur cette lancée, Fabrice Heuvrard, expert-comptable et commissaire aux comptes, vous propose un exposé aux allures de consultation gratuite : et si vous étiez nomophobe ?
Par Fabrice Heuvrard, expert-comptable, @FabriceHeuvrard
Qu’est-ce que la nomophobie ?
Tremblements, angoisses, difficultés à vous concentrer ? Si vous ressentez ces symptômes lorsque vous êtes éloignés de votre smartphone, ou bien que l’indicateur de batterie de votre téléphone devient rouge, alors vous êtes peut-être victime du syndrome de la « nomophobie » !
La « nomophobie » peut se décrire comme la peur excessive d’être séparé de son téléphone portable.
Au-delà de l’ironie implicite de cette introduction se cachent divers problèmes de fonds qui touchent les experts-comptables et leurs collaborateurs, peu importe la génération, la taille du cabinet et la zone géographique.
Les origines du « mal »
De l’omniprésence…
En l’espace d’une centaine de publications du Francilien, les outils de la transition numérique (Internet, les réseaux sociaux, les smartphones) sont devenus omniprésents dans notre vie quotidienne et ont profondément modifié notre rapport au monde.
Désormais, les smartphones rythment notre vie !
Aperçu d’une journée type :
❱ Le smartphone nous réveille avec notre musique préférée.
❱ Le smartphone nous permet d’écouter un podcast pendant notre trajet matinal.
❱ Arrivée au travail : les messages WhatsApp, les notifications Twitter, les demandes d’ajouts sur LinkedIn surgissent sur l’écran.
❱ Notre smartphone nous rappelle notre prochain rendez-vous avec notre client X.
❱ Ils nous indiquent que nous avons 50 emails en attente.
❱ Arrive l’heure du déjeuner, une application de recherche de restaurants permet de trouver la « perle » pour nous restaurer
❱ A l’issue du restaurant, nous prenons en photo l’addition afin de le transmettre à l’application de reconnaissance des justificatifs d’achat du cabinet.
❱ Nous sommes en retard, nous lançons une application de recherche de VTC.
❱ Notre smartphone sonne – Eh oui, ils servent encore à émettre et recevoir des appels (c’est vintage) !
❱ Un ami nous donne rendez-vous dans une rue inconnue, nous lançons une application de géolocalisation pour trouver le chemin le plus rapide pour le retrouver.
❱ De retour à notre domicile, nous mettons à jour la liste de course disponible sur le…smartphone.
❱ Nous relisons le programme du lendemain sur l’application d’agenda du cabinet…
Nous pouvons aisément comparer le smartphone d’un expert-comptable « connecté » avec le doudou d’un enfant. Notre smartphone est « notre doudou numérique ». On peut aisément comparer la similitude des symptômes de l’enfant à ceux de l’expert-comptable lors de la perte de ceux-ci.
… à la procrastination
Le smartphone est un outil qui permet d’exprimer tout notre potentiel de procrastination. L’être humain est ainsi fait, il est plus facile de procrastiner, que de participer à un processus de création de valeur ajoutée (pécuniaire ou extra-pécuniaire).
En effet, vous connaissez tous ce petit tweet qui renvoie vers un site Internet, le pop-up de pseudo information des applications de médias sociaux. Cependant, force est de constater que le smartphone consomme de manière avide le peu de temps de disponibilité intellectuelle qu’il nous reste entre toutes les tâches que nous réalisons au quotidien. Et c’est sans compter l’avalanche de contenu informationnel qui défile sous nos yeux chaque jour – cet état de fait est parfois qualifié « d’infobésité ». Comprendre ici un excès d’information.
Mais ne vous méprenez pas, les phases de procrastination
sont une étape majeure dans le processus créatif. Les bonnes idées ne viennent-elles pas quand nous laissons voyager nos pensées ? Encore faut-il que notre esprit soit libéré de l’emprise de notre « si précieux » smartphone…
Symptômes
L’omniprésence et l’omnipotence de cet outil révolutionnaire, peut avoir de fâcheuses conséquences sur notre autonomie et notre capacité à apporter une réponse satisfaisante à l’inattendu.
Quelques exemples :
❱ L’incapacité à trouver un lieu de rendez-vous qui était précédemment mémorisé dans le smartphone, rendu indisponible à cause de l’extinction de la batterie.
❱ La recherche d’un câble de la marque à la pomme devient le besoin numéro 1 dans la pyramide des besoins de Maslow.
❱ L’indisponibilité intellectuelle lors des réunions, occasionnant en cumul une perte de productivité phénoménale. On peut aisément s’en rendre compte lors d’une réunion, en demandant à un des participants qui s’agitent sur son PC, de synthétiser les échanges des 15 dernières minutes…
D’un point de vue plus global, cette emprise du smartphone empêche de prendre du recul par rapport à son environnement. En effet, nous nous sentons plus concernés par nos notifications, que par notre environnement immédiat, avec des conséquences détestables dans les relations humaines quotidiennes. Par ailleurs, le constat est valable pour toutes les générations. En effet, à la différence de la micro-informatique en son temps, le taux de pénétration du smartphone dans notre civilisation et son taux d’utilisation est bien plus élevé et a été bien plus rapide.
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A lire : 2h chrono pour déconnecter (et se retrouver) de Fabienne Boucaret, ed. Dunod |